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LES VILLES EUROPÉENNES LUTTENT CONTRE LE SURTOURISME

30 Août 2024 06:31 (UTC+01:00)
LES VILLES EUROPÉENNES LUTTENT CONTRE LE SURTOURISME
LES VILLES EUROPÉENNES LUTTENT CONTRE LE SURTOURISME

Paris / La Gazette

Dans toute l'Europe, les hauts lieux du tourisme sont confrontés aux défis du surtourisme et s'efforcent d'équilibrer les bénéfices économiques et la qualité de vie des résidents.

Rome, Barcelone et Athènes sont de plus en plus frustrées par l'afflux de vacanciers.

Après un répit temporaire pendant la pandémie de Covid-19, les habitants et les militants de ces destinations populaires sont à nouveau confrontés à des problèmes de surtourisme. En réaction, ils sont descendus dans la rue pour protester de manière créative, notamment à l'aide de pistolets à eau et d'autocollants invitant les touristes indisciplinés à rentrer chez eux. L'essor du tourisme n'est pas qu'un simple désagrément mineur ; il a des conséquences tangibles.

Le surtourisme fait grimper le coût du logement, accélère l'embourgeoisement et exacerbe la pression sur des ressources essentielles comme l'eau. Dans les régions touchées par la sécheresse, comme Barcelone et la Sicile, la forte consommation d'eau des touristes est devenue une préoccupation majeure, certaines villes envisageant même de refuser des visiteurs pour préserver les ressources. Malgré ces problèmes, de nombreux gouvernements hésitent à imposer des mesures strictes contre le tourisme.

Pour les pays du sud de l'Europe, comme l'Espagne, le Portugal, la Grèce et l'Italie, le tourisme est un moteur économique essentiel. Selon Allianz, le tourisme représente 11,3 % du PIB de la Croatie et entre 6 et 8 % pour les autres pays méditerranéens. Le boom post-pandémique du "tourisme de revanche" a contribué à ce que ces pays surpassent l'économie de l'UE en 2023, avec un taux de croissance du PIB dépassant les 2 %, contre 0,5 % pour l'UE.

"Ce que nous voyons aujourd'hui dans les médias reflète ce qui a commencé avant même la pandémie", a déclaré à POLITICO Sandra Carvão, directrice de l'intelligence du marché, des politiques et de la compétitivité à l'agence des Nations unies pour le tourisme. "Il y avait déjà un mouvement croissant et des protestations contre le tourisme dans diverses destinations, et nous assistons à leur résurgence."

La hausse des températures et l'escalade des frustrations alimentent ce nouveau mécontentement. Fin juillet, environ 20 000 militants anti-tourisme ont convergé vers Palma de Majorque, appelant à une transformation du modèle touristique qui, selon eux, nuit aux îles Baléares. Avec un nombre de touristes qui atteindra 14,4 millions en 2023 - dépassant de loin la population permanente des îles, qui est d'environ 1,2 million -, la tension est palpable.

À Barcelone, lors d'une manifestation de moindre ampleur, des militants ont utilisé des pistolets à eau pour cibler les visiteurs étrangers, une action condamnée par le ministre espagnol du tourisme comme étant contraire à l'éthique de l'hospitalité de la nation. Dans toute l'Espagne, notamment à Madrid, Malaga, Grenade et Alicante, les autocollants et les graffitis qualifiant les touristes de "guiris" (terme légèrement péjoratif désignant les visiteurs qui ne respectent pas les normes locales) sont de plus en plus courants. Des sentiments anti-tourisme similaires sont apparus dans les hauts lieux touristiques du Portugal, de l'Italie et de la Grèce, reflétant un mécontentement plus large à l'égard de l'impact du tourisme.

Les villes s'attaquent à ce problème en imposant des amendes, des redevances et des interdictions, mais l'efficacité de ces mesures reste inégale. Pour réduire l'impact du surtourisme, plusieurs villes ont mis en place une série de mesures. À Portofino, en Italie, il est interdit aux touristes de prendre des selfies dans certaines zones, tandis qu'à Rome, il est interdit de s'asseoir sur la Place d'Espagne.

Dubrovnik, en Croatie, et Santorin, en Grèce, ont interdit les grands bateaux de croisière, et Cinque Terre a imposé une règle interdisant les tongs. Venise a tenté de s'attaquer au problème en imposant un droit d'entrée symbolique de 5 euros afin de réguler le nombre de touristes.

Toutefois, cette mesure s'est retournée contre les habitants, qui ont protesté contre la transformation de la ville en parc d'attractions. Pour tenter de remédier à la pénurie de logements, le maire de Barcelone a annoncé en juin que la ville interdirait la location d'appartements à court terme aux touristes d'ici à 2028. Cette décision fait suite à des mesures similaires prises aux îles Canaries, à Berlin et à Lisbonne au cours de la dernière décennie.

Sandra Carvão, de l'agence des Nations unies pour le tourisme, souligne qu'une stratégie touristique réussie doit équilibrer les impacts économiques, sociaux et environnementaux, tout en tenant compte de la demande et de la capacité de charge de la destination. Amsterdam offre un exemple positif de gestion efficace du tourisme.

La ville a interdit de fumer de l'herbe dans le quartier rouge, a lancé une campagne pour décourager les fêtards britanniques turbulents et a récemment annoncé l'interdiction de la construction de nouveaux hôtels. À l'inverse, Copenhague a adopté une approche plus ouverte, récompensant les comportements touristiques respectueux de l'environnement, tels que l'utilisation du vélo, des transports publics ou le nettoyage des détritus. Les récompenses vont du café gratuit à l'entrée gratuite dans les musées, ce qui témoigne d'un engagement en faveur du tourisme durable.

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