ARMÉNIE : LA FRANCE FAIT CAVALIER SEUL… MAIS SES MONTURES SONT DES ÂNES
Paris / La Gazette
L'incohérence de la position française sur le Caucase du sud est révélatrice d'une France qui a perdu ses repères
Il fut un temps, pas si lointain, où la France avait une voix qui portait sur la scène internationale. Sous de Gaulle, elle fut le premier pays occidental à reconnaître la Chine, puis à se libérer du joug américain en quittant l’OTAN et entretenir des relations avec l’URSS. Plus tard, elle eut le courage de dire non à l’invasion de l’Irak. Elle fut le fer de lance d’une Europe forte, respectueuse des nations. Même si tout n’était pas parfait, loin de là, chez les héritiers de la Révolution, la France était respectée pour son sens de l’éthique, de la justice, et pour son courage.
Aujourd’hui qu’en est-il ?
Ridiculisée en Russie, expulsée d’Afrique, méprisée par l’Amérique malgré la servilité qu’elle affiche à son égard, la France n’est plus entendue, et quand elle l’est, personne ne l’écoute. Sous l’impulsion d’un chef d’Etat qui a divorcé de son peuple et d’une classe politique gesticulante et stérile, la France ressemble de plus en plus à son emblème : le coq qui plastronne, les pattes dans la fange, poussant, bec en l’air et crête au vent, un grotesque cocorico.
Car la France – et non pas les Français – font des choix qui ne sont pas dictés par l’intelligence politique, la fine analyse des enjeux planétaires, mais par les idéologies nauséabondes de groupes de pression qui mettent le pays en coupes réglées.
Prenons l’exemple du Caucase. Alors que les relations avec l’Azerbaïdjan ont, jusque-là, été plus que cordiales, et alors qu’elle a voté les résolutions de l’ONU condamnant l’occupation arménienne, la France, au lieu de soutenir l’Azerbaïdjan dans la libération de son territoire, s’est rangée du côté des irrédentistes arméniens. Elle s’est mise à défendre le principe d’une république arménienne en plein cœur de l’Azerbaïdjan, alors que celle-ci n’a même pas été reconnue par l’Arménie elle-même. Les Français sont devenus plus arméniens que les Arméniens.
Pourquoi, alors que cette occupation a déstabilisé toute la région, alors que l’Arménie est soutenue par l’Iran que condamne la France, alors que c’est à travers le Karabakh occupé qu’étaient contournées les sanctions occidentales contre la Russie ; pourquoi en France parle-t-on de nettoyage ethnique à propos de la reprise de Khankendi (rebaptisée Stepanakert par les forces arméniennes) alors qu’il n’y a pas eu de victimes civiles, que les 100 000 habitants étaient libres de rester chez eux, et que le seul nettoyage ethnique que la région ait connu est l’expulsion de 250 000 azéris d’Arménie en 1987 et de 750 000 azerbaïdjanais du Karabakh et des régions environnantes en 1993 ; pourquoi enfin soutenir une armée qui a posé un million- de mines terrestres au moment de son départ, dans le seul but de faire des victimes civiles ?
Comment expliquer l’absurde, sinon par la pression d’une idéologie mortifère portée par la droite islamophobe triomphante propulsée par Emmanuel Macron, lequel doit d’ailleurs s’en mordre les doigts aujourd’hui, "jurant, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus" .
Dernier avatar de cette forfaiture, une conférence, organisée le 6 décembre par « La Sorbonne pour l’Organisation des Nations Unies (SONU) », avec le concours de l'Association de Soutien à l'Artsakh . )L’activiste Hovhannès Guévorkian, et l’écologiste Yannick Jadot qui s’est sans doute trompé de combat, ont débité, devant un parterre d’étudiants, les thèmes de la propagande de la diaspora nationaliste arménienne française, avec l’appui du « journaliste » militant du Figaro-magazine Jean-Christophe Buisson. Ils « ont analysé les relations entre l'Arménie, l'Artsakh, l'Azerbaïdjan - la France - avec un bilan de la scandaleuse COP29. La situation catastrophique en Azerbaïdjan, pays comparé à la Corée du Nord tant au niveau des droits de l'homme que de l'écologie, a été soulignée » résume le post de « Armenian Pride » sur le réseau X.
Contrairement aux autres pays qui ont largement salué la réussite de la COP29, la France a choisi de se réfugier dans le déni xénophobe.
L’annonce de cette conférence a amené l’Association Dialogue France-Azerbaïdjan à adresser une lettre aux organisateurs. Ceux-ci ont répondu, non sans un certain cynisme « Nous ne représentons pas l’ONU ni ses paroles, mais nous nous inspirons de ses valeurs et ses grands principes. Notre conférence n’a pas pour objet d’être une propagande, mais d’instaurer une discussion. Par conséquent, les membres de votre association sont bienvenue.es à la conférence s’ils/elles souhaitent poser des questions ou débattre. » Lorsque la conférence s’intitule « La COP29 en Azerbaïdjan : du greenwashing au crimewashing », il est permis d’avoir des doutes sur la volonté de dialogue des interlocuteurs, lesquels ont d’ailleurs affirmés que la lettre reçu était une « lettre d’intimidation et de menace ». Nous reproduisons ici l’intégralité de celle-ci. Les lecteurs jugeront d’eux-mêmes …
« Madame, Monsieur,
Nous vous adressons ce courrier concernant votre événement intitulé « La COP29 en Azerbaïdjan : du greenwashing au crimewashing », prévu pour ce soir à la Sorbonne, Paris 5e.
Outre l’intitulé à caractère diffamatoire, nous avons constaté sur l’affiche la présence du drapeau d’une entité séparatiste illégale, communément appelée « république autoproclamée du Haut-Karabakh », non reconnue par l’ONU - dont vous prétendez véhiculer les valeurs selon votre site internet -, ni par la France, ni même par l’Arménie. Après examen de la liste des intervenants, il apparaît que vous avez délibérément sélectionné des personnes s’étant exprimées de manière accusatoire et diffamatoire à l’encontre de l’Azerbaïdjan, se fondant sur une propagande pro-arménienne en France. Ces éléments ne laissent guère de doute quant à la nature du contenu de cette soirée, qui s’annonce comme une diffusion de narratifs fallacieux émanant des séparatistes arméniens.
Nous estimons qu’il est profondément regrettable d’instrumentaliser la thématique climatique comme prétexte à la promotion d’une propagande mensongère des séparatistes arméniens, et ce pour les raisons suivantes :
Les résolutions 822, 853, 874 et 884 du Conseil de sécurité de l’ONU sont sans équivoque : c’est l’Arménie qui a occupé près de 20% du territoire azerbaïdjanais dans les années 1990. De nombreux rapports attestent du nettoyage ethnique perpétré par les séparatistes arméniens, ayant conduit à l’expulsion de plus de 600 000 Azerbaïdjanais de leurs terres natales au Karabakh [1], sans compter les 200 000 autres expulsés d’Arménie peu avant le conflit en 1987 [2]. À cette époque, 10% de la population du pays était constituée de réfugiés internes, dans l’indifférence internationale la plus totale et dans un contexte de pauvreté post-soviétique. Les droits de l’homme ne s’appliquent-ils pas aux civils azerbaïdjanais ?
Votre événement prétend aborder la question des crimes, mais il est peu probable que vos intervenants mentionnent les atrocités commises par les séparatistes arméniens, telles que le massacre de Khodjaly en 1992 [3], l’équivalent azerbaïdjanais d’Oradour-sur-Glane. Le séparatisme arménien, dont la propagande sera vraisemblablement relayée lors de votre événement de ce soir, a déjà coûté la vie à 30 000 Azerbaïdjanais, dont des civils, des femmes et des enfants. Nous estimons donc qu’il serait malvenu de se faire le complice de tels crimes.
Enfin, les conséquences dévastatrices de l’occupation sont toujours visibles au Karabakh : une forte contamination des sols par les mines [4], des villes entières réduites à l’état de ruines, comme Aghdam ou Füzuli [5]. C’est la raison pour laquelle ce sujet demeure si douloureux pour les Azerbaïdjanais, et toute accusation à l’encontre de l’Azerbaïdjan qui omettrait de mentionner ces faits ne saurait être qualifiée que d’hypocrite.
Si vous aspirez à être considérée comme une association crédible et non comme un simple relais de propagande mensongère, ce type d’événements ne saurait y contribuer.
Nous souhaitons également attirer votre attention sur certaines informations erronées présentées dans votre world map concernant le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan :
« 1921 : L’URSS rattache le Haut-Karabagh à l’Azerbaïdjan. Mais le rattachement de cette enclave à l’Azerbaïdjan n’a jamais été reconnu par les Arméniens. » Cette affirmation est inexacte : en 1921, le Bureau caucasien du Parti communiste a décidé de maintenir, et non de rattacher, le Haut-Karabakh au sein de l’Azerbaïdjan, comme en atteste le document ci-joint.
« 26 novembre 1991 : Déclenchement de la première guerre par l’Azerbaïdjan comme réaction à la déclaration d’indépendance : il occupe militairement le Haut-Karabagh. L’Arménie répond en s’engageant contre l’Azerbaïdjan. » Cette assertion est erronée, car le Haut-Karabakh faisait déjà partie intégrante de l’Azerbaïdjan. Ce n’est pas l’Azerbaïdjan qui a déclenché la première guerre, mais l’Arménie qui cherchait à annexer la région en profitant de l’instabilité post-soviétique.
« Facteurs économiques : La région du Haut-Karabagh est riche en pétrole et gaz. » Cette information est fausse : il n’y a ni pétrole ni gaz dans le Haut-Karabakh. De telles erreurs grossières sont préjudiciables à la crédibilité d’une association qui se veut sérieuse.
Nous comprenons que l’initiative de ces événements contestables émane probablement de certains de vos membres d’origine arménienne. Néanmoins, le fait que Sorbonne ONU leur accorde une tribune pour ce type de propagande non seulement discrédite cette association, mais ternit également l’image internationale de Sorbonne Universités, dont certains membres de notre association sont diplômés.
Gunel Safarova
Aytan Muradova
Murad A.
Le Conseil d’Administration
Jean-Michel Brun