GOUVERNEMENT BARNIER : LA DROITE ISLAMOPHOBE ET ANTI-AZERBAÏDJANAISE PREND LES RÊNES DE L’EXÉCUTIF
Paris / La Gazette
Michel Barnier a « enfin » révélé la composition de son gouvernement. Un long suspense pour un dénouement en forme d’interrogation : que va faire ce gouvernement hétéroclite, dont les ministres ont été désignés sans qu’aucun programme ne soit présenté, contrairement à ce que fait toutes les démocraties occidentales lorsque l’exécutif est issu d’une coalition ? Mais en France, on ne compose pas un gouvernement à partir de l’accord sur un programme, mais plutôt en fonction des affinités politiques ou personnelles.
En tous cas, ce gouvernement est peut-être le plus à droite des 15 dernières années, alors que c’est la gauche qui est arrivée en tête des élections législatives, de manière relative certes, mais devant les partis dont sont issus les nouveaux ministres.
Sur la question du Caucase, on a aussi matière à s’inquiéter. Si on pouvait espérer que la raison l’emporterait sur l’hystérie anti-azerbaïdjanaise du précédent gouvernement, on est loin du compte.
Deux ministres d’origine arménienne entrent au nouveau gouvernement. En soi, ce ne serait pas un problème, si les deux ministres ne s’étaient illustrés dans les campagnes anti-azerbaïdjanaises et dans leur soutien inconditionnel aux séparatistes du Haut-Karabakh.
Astrid Panosyan-Bouvet a été nommée ministre du travail et de l’emploi. Elle est passée du Parti Socialiste au macronisme en co-fondant le mouvement « En Marche », puis en devenant députée Renaissance. Elle est co-signataire en 2022 de la proposition de résolution à l'Assemblée nationale visant à exiger « la fin de l’agression de l’Azerbaïdjan à l’encontre de l’Arménie » . Comme si ce n’était pas l’Azerbaïdjan qui avait été victime d’une occupation trentenaire du cinquième de son territoire ! Elle a également conduit une délégation de politiciens français en Arménie afin de les rallier à la cause d’Erevan.
Guillaume Kasbarian est le nouveau ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l'action publique. Député macroniste depuis 2017, il a rejoint la ligne du Printemps républicain sur la laïcité. À l'automne 2020, poussé par le puissant lobby des producteurs de betteraves, il vote pour la réintroduction des pesticides néonicotinoïdes qui sont en train de décimer les abeilles. En 2019, il proteste contre l’organisation d’une manifestation contre l’islamophobie en France.
Militant arménien très actif, il a été l’un des signataire de la proposition de résolution anti-azerbaïdjanaise, et a qualifié la libération du Karabakh par l’Arménie de nettoyage ethnique. Il a reproché au gouvernement français de l’époque d’acheter du gaz azerbaïdjanais.
Mais ce ne sont pas les pires :
Michel Barnier, sur la recommandation d’Emmanuel Macron a désigné comme Ministre de l’intérieur Bruno Retailleau, à côté duquel l’islamophobe Gerald Darmanin fait figure d’islamo-gauchiste. Ce sénateur catholique ultra-conservateur est l’incarnation de l'aile droite des Républicains. Pourfendeur des musulmans et de ceux qui protestent contre le massacre des civils en Palestine, il est l’un des plus ardents défenseurs de l’imaginaire république arménienne du Karabakh, considérant que «La communauté internationale s'est déshonorée», en ne lui apportant pas officiellement son soutien.
«On laisse seul dans son malheur l'Arménie ! Ils sont trop chrétiens, on a peur de Monsieur Erdogan ? On a là a une épuration ethnique et religieuse » s’est-il exclamé, avant de rejoindre une délégation devant le corridor de Latchine an compagnie d’Anne Hidalgo et de Xavier Bertrand.
Bruno Retailleau , qui fut le rapporteur des résolutions au Sénat sur « l’Artsakh », considère que le conflit du Caucase n’est pas une guerre de libération, mais une guerre de civilisation menée par les musulmans du monde turcique contre les Arméniens du monde chrétien. On pourrait toujours se réjouir qu’il ne soit pas ministre des affaires étrangères, mais de ce coté, ce n’est guère plus réjouissant.
Le nouveau Ministre des affaires étrangères est en effet Jean-Noël Barrot. Celui-là-même qui avait prononcé un discours fortement partisan à la fête de l’indépendance de l’Arménie à Paris.
Quant à Sébastien Lecornu , artisan de la coopération militaire entre la France et l’Arménie, il a été reconduit dans ses fonctions de ministre des Armées et des Anciens combattants.
Didier Migaud remplace Dupont-Moretti à la Justice. Laquelle d’ailleurs ? Puisqu’il fut le rapporteur de la loi de reconnaissance du génocide arménien en 2000 et d’une proposition de loi contre le négationnisme du même « génocide ».
D’autres nouveaux ministres, comme Antoine Armand, Ministre de l’économie, Anne Genetet, Ministre de l’éducation nationale, et Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe, ont été signataires de la proposition de résolution de 2022.
Finalement, la seule qui n’ait jamais été compromise dans le lynchage anti-azerbaïdjanais est Rachida Dati qui a été reconduite dans ses fonctions à la tête du Ministère de la culture. Il lui faudra beaucoup de courage pour faire valoir la richesse culturelle de l’Azerbaïdjan sans risquer la censure de ses collègues. Beaucoup de courage aussi à l’ambassadrice d’Azerbaïdjan en France qui se trouve face aux pires interlocuteurs possibles. Mais qu’elle se rassure, les Français sont encore beaucoup plus à plaindre…