LE PRIX DE L'OR EXPLOSE: POURQUOI ÇA FLAMBE?
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Paris / La Gazette
Le métal jaune vient de claquer un nouveau record historique en février, grimpant jusqu’à 2954 dollars l’once. C’est déjà la dixième fois depuis le début de l’année que l’or dépasse ses propres sommets. Alors, pourquoi ce précieux métal reste-t-il un placement aussi béton ? Décryptage.
Depuis janvier 2024, l’or s’est envolé de 12 %, atteignant ce sommet historique de 2954 dollars l’once. Principal facteur de cette montée en flèche : la menace de Donald Trump de balancer de nouveaux droits de douane, un scénario qui pourrait foutre le feu à l’économie mondiale. Comme à chaque fois que ça sent le roussi, les investisseurs se ruent sur l’or, valeur refuge par excellence.
D’après le World Gold Council, l’année dernière, l’or a pété le score en battant des records à 40 reprises. Pour le quatrième trimestre 2024, le prix moyen s’est calé à 2663 dollars l’once, du jamais vu, et la moyenne annuelle a grimpé à 2386 dollars, soit une hausse de 23 % par rapport à l’année précédente.
Les banques centrales, elles, n’ont pas lâché l’affaire et ont continué à empiler du métal précieux. En 2024, elles ont mis la main sur plus de 1000 tonnes d’or, une tendance qui dure depuis trois ans. Rien que sur les trois derniers mois de l’année, les achats ont atteint 333 tonnes, un vrai raz-de-marée.
Goldman Sachs, voyant la tendance, a revu ses prévisions à la hausse et s’attend désormais à ce que l’or grimpe jusqu’à 3100 dollars l’once d’ici fin 2025. L’an dernier, ils tablaient sur 3000 dollars, mais vu la dynamique actuelle, ce seuil pourrait être franchi bien plus tôt.
Si l’or s’envole à chaque crise, c’est parce qu’il joue son rôle de bouée de sauvetage en période de turbulences économiques. Plus les investisseurs flippent sur l’inflation, les sanctions ou une récession mondiale, plus ils se tournent vers le métal jaune, ce qui fait grimper sa cote. Certains experts misent carrément sur 3200 dollars l’once si la tempête continue.
En parallèle, la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine reste un facteur explosif. Si Trump va au bout de ses menaces, ça pourrait plonger Pékin dans un chaos économique, avec des répercussions directes sur Wall Street. Résultat ? Encore plus de monde se ruera sur l’or.
Bien que le cours du métal précieux ne soit pas un indicateur économique clé, il reflète clairement les grandes tendances globales. Son prix varie en fonction de l’extraction, des politiques monétaires des mastodontes comme la Chine et les États-Unis, et bien sûr des mouvements des banques centrales. Pour l’instant, tous les signaux pointent vers une poursuite de la hausse. Un retour de Trump à la Maison-Blanche pourrait faire baisser les taux d’intérêt et affaiblir le dollar, ce qui propulserait encore plus l’or à la hausse. Certains experts pensent même que les 3000 dollars l’once seront atteints avant la fin de l’année.
Historiquement, chaque flambée du prix de l’or a été accompagnée d’une crise économique majeure. Sa valeur évolue en parallèle de l’inflation : plus cette dernière grimpe, plus l’or devient cher. Dès que les marchés boursiers plongent, les investisseurs fuient les actions et misent sur des actifs jugés plus stables comme l’or ou les obligations.
La croissance mondiale ralentit, et les incertitudes politiques ne font qu’ajouter du carburant au feu. Entre la confrontation commerciale entre Pékin et l’Occident et le chaos au Moyen-Orient, la mondialisation prend un sacré coup dans l’aile. Résultat : la demande pour l’or comme valeur refuge explose, et si cette tension persiste ou s’intensifie, les prix continueront leur ascension.
En 2023, l’or a pris un impressionnant +40 %, un bond digne des sommets de 2010. Selon le World Gold Council, les réserves des banques centrales et des fonds d’investissement dépassent 36 500 tonnes. Les États-Unis dominent avec 8130 tonnes, suivis de l’Allemagne (3350 tonnes), de l’Italie (2450 tonnes), de la France (2440 tonnes) et de la Russie (2340 tonnes).
D’après BullionVault, les réserves détenues par les banques centrales représentent 15 % de tout l’or jamais extrait. En 20 ans, les stocks physiques ont augmenté de 17 %, et en valeur dollar, ils ont été multipliés par six pour atteindre 2200 milliards de dollars. Rien qu’en 2023, les banques centrales ont raflé 1037 tonnes d’or, un chiffre équivalent à 2022.
Même si le monde a tiré un trait sur l’étalon-or, les États continuent de stocker du métal précieux pour stabiliser leurs devises et se protéger contre les risques inflationnistes. En diversifiant leurs réserves, ils minimisent les dangers financiers et renforcent leur sécurité économique. Bref, tant que l’incertitude domine, l’or restera roi.
Le Fonds d'État pétrolier d'Azerbaïdjan (SOFAZ) s'impose parmi les poids lourds mondiaux de l’or
D’ici la fin du troisième trimestre 2024, le Fonds d'État pétrolier d'Azerbaïdjan (SOFAZ) s’est hissé dans le top 5 des plus gros acheteurs d’or au monde. Ses réserves ont atteint 127 tonnes, enregistrant une hausse de 17,7 % en un an.
Mais l’envolée des prix du métal jaune ne se résume pas qu’à une économie sous tension. Elle découle aussi d’un changement radical dans la stratégie des plus grands acteurs financiers. D’après le Fonds monétaire international (FMI), en deux ans, les banques centrales ont empilé un record absolu de 2100 tonnes d’or – un chiffre jamais vu depuis 55 ans. Ce sont surtout les puissances émergentes comme la Chine, l’Inde, la Turquie et le Kazakhstan qui accélèrent leur désengagement du dollar américain en diversifiant leurs réserves avec du métal précieux.
La ruée sur l’or des banques centrales
La Chine reste le mastodonte du marché. En 2024, la Banque populaire de Chine (PBoC) a gonflé ses réserves de 225 tonnes, atteignant un total de 2300 tonnes. Mais la réalité pourrait être bien plus lourde : Pékin détient probablement des stocks bien supérieurs aux chiffres officiels, une partie de son or étant planquée dans des fonds stratégiques invisibles aux radars internationaux.
La Turquie, elle, carbure aussi aux achats massifs. Rien qu’en 2023, la Banque centrale turque a mis la main sur 160 tonnes d’or, une flambée de 45 % en un an, dictée par l’effondrement de la livre turque et la nécessité de bétonner son économie. Même dynamique en Inde, où les réserves d’or ont grimpé à 822 tonnes, un record historique.
D’après le World Gold Council, la boulimie d’or des banques centrales ne faiblira pas en 2025. Les prévisions tablent sur des achats annuels de 900 à 1100 tonnes, surtout si la géopolitique continue de tanguer et que le billet vert s’essouffle.
Le boom des ETF et des investisseurs institutionnels
Mais l’achat d’or ne se limite pas aux banques centrales. Les investisseurs institutionnels, eux aussi, dopent leurs positions via les ETF adossés à l’or. En 2023, les réserves totales des ETF aurifères ont bondi de 310 tonnes, atteignant 3300 tonnes. Des mastodontes comme SPDR Gold Shares (GLD) et iShares Gold Trust (IAU) ont encaissé un afflux de 21 milliards de dollars rien qu’au deuxième trimestre 2024.
Chez Bank of America, les analystes misent sur un or à 3400 dollars l’once d’ici fin 2025, si la tendance économique et politique reste la même. En cause : un probable assouplissement de la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed). Si les taux d’intérêt continuent de dégringoler, le dollar va flancher, et l’or, lui, en profitera pour s’envoler.
Un autre élément joue en faveur de l’or : l’inflation US reste bien au-dessus des objectifs de la Fed. Avec une hausse annuelle de 4,2 %, contre un objectif de 2 %, la pression inflationniste pousse toujours plus d’investisseurs à sécuriser leurs fonds en achetant du métal précieux.
Géopolitique et offre d’or : la tension monte
L’incertitude mondiale ne fait qu’alimenter la demande en or. Le chaos en Europe de l’Est, le durcissement des sanctions contre la Russie, la guerre à Gaza et les tensions sino-américaines rendent les marchés nerveux. D’après Goldman Sachs, il y a 35 % de chances que la zone euro plonge en récession en 2025 – un scénario qui propulserait encore plus haut l’intérêt pour l’or.
Côté production, pas de quoi inonder le marché. En 2023, l’extraction mondiale d’or a plafonné à 3640 tonnes, une hausse de seulement 1,2 % par rapport à l’année précédente. Le top 5 des producteurs reste inchangé :
- Chine : 370 tonnes
- Russie : 325 tonnes
- Australie : 310 tonnes
- États-Unis : 200 tonnes
- Canada : 185 tonnes
Mais il y a un hic : les nouvelles mines d’or se font de plus en plus rares. Moins de découvertes, moins de réserves, et donc un risque de pénurie dans les années à venir. Si l’offre ne suit pas la demande, la flambée des prix pourrait encore s’accélérer.
Bref, entre la frénésie d’achat des banques centrales, l’attrait des investisseurs et un climat mondial ultra-tendu, l’or n’a pas fini de briller.
Le rôle de l'Azerbaïdjan sur le marché de l'or
Ces dernières années, l’Azerbaïdjan s’est imposé comme un acteur de plus en plus influent sur le marché mondial de l’or, aussi bien par l’augmentation de ses réserves nationales que par l’accélération de sa production minière.
Le Fonds d’État pétrolier d’Azerbaïdjan (SOFAZ) a intensifié ses investissements dans l’or afin de diversifier ses actifs et de se prémunir contre l’inflation et l’instabilité géopolitique. En 2024, le fonds a acquis près de 45 tonnes de métal précieux, portant ses réserves totales de 127 tonnes en octobre 2024 à 146,6 tonnes en janvier 2025.
Ce volume a permis à SOFAZ de se hisser parmi les cinq plus gros acheteurs d’or parmi les fonds souverains à la fin du troisième trimestre 2024. Son directeur exécutif, Israfil Mammadov, a souligné que l’augmentation de la part de l’or dans le portefeuille d’investissement du fonds constituait une stratégie efficace pour se protéger des turbulences économiques mondiales.
L’objectif de SOFAZ est de porter la part de l’or à 25 % de ses actifs en 2025, ce qui confirme le rôle stratégique du métal précieux pour l’économie nationale.
L’Azerbaïdjan affiche également une forte progression dans l’extraction d’or. En janvier 2025, la production nationale a atteint 236,2 kg, soit une augmentation de 88,5 % par rapport à la même période de l’année précédente.
Les principales entreprises actives dans le secteur sont Anglo Asian Mining (AAM) et AzerGold.
Le groupe britannique Anglo Asian Miningprévoit une nette hausse de la production d’or en Azerbaïdjan en 2025, avec un objectif compris entre 28 000 et 33 000 onces (soit environ 872 à 1 026 kg), presque le double du volume extrait en 2024, qui s’élevait à 15 073 onces (469 kg).
Par ailleurs, la société prévoit une augmentation record de la production de cuivre grâce à l’ouverture de la nouvelle mine Gilar.
D’après le Comité national des statistiques d’Azerbaïdjan, les stocks d’or sous forme de produits finis dans le pays s’élevaient à 207,4 kg au 1er février 2025.
Sur l’ensemble de l’année 2024, la production d’or a atteint 2 663,5 kg, confirmant une croissance régulière du secteur minier azerbaïdjanais.
Perspectives et prévisions
Les analystes internationaux s’accordent sur une poursuite de la hausse des prix de l’or. D’après UBS Group, une once d’or pourrait atteindre 3 200 dollars d’ici fin 2025, avant de se stabiliser autour de 3 000 dollars.
Cette tendance est alimentée par l’incertitude économique mondiale et une demande croissante pour le métal précieux en tant que valeur refuge.
Dans ce contexte, la stratégie de l’Azerbaïdjan visant à renforcer ses réserves d’or et à accroître sa capacité d’extraction positionne le pays comme un acteur clé du marché mondial des métaux précieux. Il s’agit d’un levier puissant pour renforcer la résilience financière de l’Azerbaïdjan face aux secousses économiques internationales.
Avec la montée des risques géopolitiques, l’or reste un outil essentiel de préservation du capital. La forte demande des banques centrales, des fonds d’investissement et des investisseurs privés alimente la dynamique haussière du marché.
À cela s’ajoutent des facteurs clés tels que la baisse anticipée des taux directeurs de la Réserve fédérale américaine (Fed), le ralentissement de la croissance mondiale et l’intensification des tensions géopolitiques, autant d’éléments susceptibles de pousser encore plus hautles cours de l’or.
Les prévisions des plus grandes institutions bancaires et financières suggèrent que le prix de l’once pourrait atteindre 3 200 à 3 400 dollars en 2025. En cas d’aggravation des crises économiques et géopolitiques, ce seuil pourrait même être dépassé plus tôt que prévu.