AZERBAÏDJAN : LA PETITE VENGEANCE DE LA DIPLOMATIE FRANÇAISE
Paris / La Gazette
La France ne digère toujours pas les appels à la décolonisation lancés par l'Azerbaïdjan, ni l'arrestation de son espion à Bakou. Alors, dans ses "conseils aux voyageurs", le site France-Diplomatie insinue que Bakou est un pays dangereux pour les Français et qu'il vaut mieux ne pas s'y rendre.
"Risques d’arrestation, de détention arbitraire et de jugement inéquitable en Azerbaïdjan" titre cette semaine le site du ministère des affaires étrangères français dans sa rubrique "conseils aux voyageurs".
"Il est désormais déconseillé sauf raison impérative aux ressortissants français, y compris binationaux, de se rendre en Azerbaïdjan.
Les ressortissants français y compris binationaux, qu’ils soient résidents ou de passage, s’exposent à un risque d’arrestation, de détention arbitraire et de jugement inéquitable en Azerbaïdjan.
Ce risque peut concerner notamment les personnes effectuant une simple visite touristique, un voyage d’affaires. En cas d’arrestation ou de détention, le respect des droits fondamentaux n’est pas garanti.
Tout ressortissant français arrêté s’expose :
• à un placement en détention provisoire, ou une interdiction de sortie du territoire, dont la durée peut s’étendre sur plusieurs mois ;
à de lourdes condamnations à des peines d’emprisonnement au terme de procès qui peuvent ne pas respecter les droits de la défense." explique France-Diplomatie.
A quoi fait-il allusion ? A la récente arrestation de l'homme d'affaires Martin Ryan, qui s'était fait prendre "la main dans le pot à confitures" dans une opération digne des pieds nickelés téléguidés par les services secrets français. Le pauvre Français, devenu espion "à l'insu de son plein gré", et surtout sous le chantage des Mr Bean français qui le menaçaient de ruiner son affaire s'il ne coopérait pas, avait été placé en détention après avoir avoué toute l'affaire.
VOIR NOTRE ARTICLE "L'ÉTRANGE AFFAIRE MARTIN RYAN"
Les Français ont, naturellement, nié les faits et abandonné Martin Ryan à son triste sort, collaborateur occasionnel, involontaire et sans grand intérêt à leurs yeux, tandis que les deux membres des services français, protégés par leur statut diplomatique, ont simplement été priés de quitter le pays. En représailles, la France a déclaré persona non grata deux membres du personnel de l'ambassade d'Azerbaïdjan. Les réalités de l'espionnage sont loin d'être aussi flamboyantes que les fictions de James Bond.
Martin Ryan est le seul français à avoir été arrêté en Azerbaïdjan, hormis un autre individu, Théo Hugo, condamné à trois mois de prison pour s'être livré à des actes de vandalisme dans le metro de Bakou.
Les autorités azerbaïdjanaise ont réagi aussitôt par un communiqué du ministère des Affaires Étrangères : "L’Azerbaïdjan condamne la déclaration du ministère français de l'Europe et des Affaires étrangères sur l'avertissement de voyage pour l'Azerbaïdjan, faisant référence à des allégations infondées selon lesquelles des Français auraient été détenus et ciblés en Azerbaïdjan." a déclaré Aïkhan Hadjizadé, porte-parole du ministère azerbaïdjanais des Affaires étrangères, qui a ajouté : "Jusqu'à présent, seul le citoyen de la République française Martin Ryan a été arrêté, le 4 décembre, en Azerbaïdjan, soupçonné d'avoir commis l'acte prévu à l'article 276 (espionnage) du Code pénal de la République d'Azerbaïdjan. En outre, on sait qu'un autre citoyen français, Théo Hugo, a été arrêté pour l'acte qu'il avait commis dans le métro de Bakou.Ce jugement et cette déclaration infondés et biaisés de la part de la France reflètent l'intention de ce pays de détériorer davantage ses relations avec l'Azerbaïdjan."
En réalité, les raisons de cette gaminerie diplomatique est plutôt à chercher du côté de l'agacement de l'Elysée motivé par le soutien de l'Azerbaïdjan aux mouvements anticolonialistes, français notamment. La France a ainsi interdit de séjour ou expulsé les journalistes azerbaïdjanais qui souhaitaient enquêter sur les manifestations en Nouvelle Calédonie, aux Comores ou dans les Antilles. "Il est évident que les obstacles imposés par la France aux journalistes azerbaïdjanais lors de leurs visites en France et même dans d'autres pays Schengen sont totalement en contradiction avec les « droits de l'homme » promus par ce pays" a indiqué Aïkhan Hadjizadé.
Les campagnes violemment anti-azerbaïdjanaises de l'État et des médias français sont également portées par le soutien inconditionnel des autorités françaises aux activistes arméniens qui ont occupé pendant presque trente ans le cinquième du territoire azerbaïdjanais. Le ministère français des Affaires Étrangères a d'ailleurs précisé qu' "il reste formellement déconseillé de se rendre dans les zones frontalières avec l’Arménie ainsi que dans les régions de l’ancien oblast autonome du Haut-Karabagh et des anciens districts adjacents"
Pourtant, beaucoup de Français résident ou voyagent régulièrement en Azerbaïdjan, sans aucun risque, puisque le pays est l'un des plus sûrs au monde. Mais la cohérence n'est pas la caractéristique essentielle de la diplomatie française.
"Tout le monde est bien conscient des violations du droit international, de la politique néocoloniale, des activités racistes, discriminatoires et islamophobes et des restrictions des droits de l'homme de la part de la France. La France, qui formule des revendications sur l'autorité judiciaire et les droits de l'homme en Azerbaïdjan, tente de donner au monde une « leçon de démocratie ». Il serait donc plus bénéfique pour la France de tirer les leçons de telles actions." conclut le porte-parole de la diplomatie azerbaïdjanaise.
Un nouveau gouvernement va prochainement se mettre en place en France. Changera-t-il la politique de la France au Caucase ? On en doute, puisqu'en France, c'est le Président de la République qui décide de tout.
Jean-Michel Brun